Le copain

A priori il a tout pour plaire.
Tout d’abord il va occuper Choupinet. Choupinet aura quelqu’un à qui parler, de tout, de rien. Pendant des heures. Et vous ne serez pas tenue de l’écouter, prenant l’air et le hochement de tête inspiré du gendarme à St Tropez. Non. Inutile de feindre une passion débordante pour les obus et autres baïonnettes, pour les espions et autres agents secrets. 
Ensuite il va occuper Choupinet.
Et  il va occuper Choupinet.
Vous l’accueillez donc avec bonheur et bienveillance, le copain. Vous avez même fait des crêpes pour le gouter. Nutella ? Sucre ? Confiture ? Il préfère  une glace. Plus précisément, il veut une glace. Bien, bien, bien.  Ne perdez pas de vue son potentiel d’occupation.  Asseyez-vous sur la politesse bien confortablement et préparez-lui une coupe de glace.
Finalement ils sont partis jouer …  Bon, bon, bon. Vous n’aviez pas l’intention de goûter, vous ?  En finissant les trois ultimes chapitres de votre polar, ce sera parfait.
Ah, vous vous réjouissez trop vite… Ces cris ne viennent visiblement pas de chez la voisine impotente. C’est plus aigu, plus perçant. Clairement, ça va vous empêcher de savourer le dénouement.  Vous vous interrogerez plus tard sur les avantages d’enfanter des petits muets, Choupinette ne va vraisemblablement pas mettre un terme à ces hurlements sans intervention de votre part…

Ah, il semblerait que la douillette Choupinette ait trouvé une bonne raison de vagir. C’est pas joli, joli cette bosse qui lui pousse sur le front et qui grossit à vue d’œil…. Choupinet fonce chercher l’arnica magique, vous partez en quête d’un gant rempli de glace. Le copain ? Il joue avec un camion, tentant de couvrir de bruits de moteur les mugissements de votre cadette,  avec un certain succès d’ailleurs. Vous n’avez plus de glaçons, mais il vous reste la glace qui est fondue à point, très efficace pour apaiser  Choupinette.
A l’étage  le copain a lancé une nouvelle activité… Vous n’avez pas l’intention de vous hasarder dans un débat sur l’égalité des chances, vous ne souhaitez pas plus alimenter une étude sociologique sur  le comportement stéréotypé des parents en fonction du sexe de leur enfant… Non… Vous voulez juste terminer votre fichu bouquin. Vous vouliez. Parce que jouer à la 4e guerre mondiale ne contribue pas à créer une atmosphère propice à la lecture… Alors vous vous moquez de savoir si la maman du copain l’a abreuvé de compliments sur sa force, s’il a été bercé par la rengaine « un garçon, ça ne pleure pas, un garçon », vous vous en moquez … Mais vous n’allez pas tarder à renvoyer cette graine de Poutine chez lui…
Vous laissez une dernière chance au dialogue et montez vous enquérir des divers belligérants et de la possibilité d’un armistice…Choupinet vous met en joue tout en vous apostrophant de manière très… colorée… Et variée. Visiblement le copain a su enrichir le vocabulaire de Choupinet, et ce dernier a de la mémoire, quand il veut, bonne nouvelle.  Par contre il a gagné en jurons ce qu’il a perdu en obéissance. Logique sans doute. Mais regrettable. Du moins de votre point de vue.
La capacité d’adaptation de Choupinet  et la force éducative du copain vous laissent pantoise… Comment ! Vous bataillez depuis 9 ans 6 mois et 24 jours pour obtenir de Choupinet un comportement policé, voire courtois, civilisé tout du moins. Et en quelques petites heures, à peine !, le copain a réduit vos efforts à néant ! Vous hébergez à présent une horde, à partir de 3 les enfants peuvent constituer une horde, c’est troublant mais rigoureusement exact, une horde, donc, de sauvageons. La horde se précipite, hurlante et écumante, sur le placard à bonbons avant de se désaltérer à grandes goulées d’une boisson sucrée certainement bien trop revigorante…
Vous envisagez un repli stratégique…Regrettant l’absence d’un abri anti-atomique dans votre jardin… A noter dans la liste des choses à faire…On sonne à la porte ? Des casques bleus ? La croix rouge ?  Mieux ! La mère du monstre ! Contre toute attente elle tient à le récupérer !
Mal vous prend d’être polie et d’entrebâiller un tantinet trop la porte… La malheureuse inconsciente a 3, 3 ! autres monstres, plus jeunes, plus vifs, qui se joignent aux forces armées !
Lucide, vous renoncez à obtenir que le troupeau ôte ses chaussures avant de sauter sur le canapé. Résignée, vous faites mentalement le compte des heures qu’il vous faudra pour  restituer à votre logis son état premier, ah un bruit de verre cassé…, disons un état approchant l’état initial, ce sera amplement suffisant. Dubitative, vous renoncez à épauler la mère du quatuor dans son entreprise de regroupement. Admirative, vous vous étonnez de sa sérénité face à l’adversité…
Vous vous êtes toujours demandée ce qu’il se cachait derrière la placidité de ces mères exaspérantes, ô combien, qui ne sont jamais débordées, énervées, jamais hystériques, tyranniques, jamais hurlantes, jamais punissantes, jamais, les garces.

Mais ceci est un autre chapitre.

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