Confinement 13
La bataille journalière n’est pas finie : qu’est-ce
qu’on mange? Encore une fois, Choupinette vous frappe cruellement de ce dilemme
sans cesse renouvelé alors même que vous n’avez pas ôté vos souliers. À croire,
qu’elle a passé la matinée à guetter votre retour pour mieux vous exploser le
moral. Mais pourquoi ? Pourquoi tant de constance ? Puisqu’elle ne mangera pas
! Pour savoir ce qu’elle va refuser de goûter ? À moins que la bonté
fraternelle ait d’obscurs chemins et qu’elle songe à l’estomac de Sandwich-man
qui n’a pas les exigences sororales.
Avant de répondre à votre charmante harceleuse, vous devez
trancher entre deux voies : acheter une paix qui sera toujours trop courte à
coups de chips-mayo-frites-glaces ou tenter de limiter les dégâts inhérents à
votre tendance canapophile avec force salade et brocolis. Dans un cas comme
dans l’autre, vous allez souffrir. Différemment. Mais souffrir. Punaise, c’est
ça, plus encore en ces temps confondants, la seule certitude : la souffrance.
Et d’aucuns vanteront les bienfaits de la méditation, expliqueront que le
confinement les a tout droit conduits sur le chemin de la sagesse et de
l’acceptation. Souffrance. Toujours. Et culpabilité. Vous, après des semaines
enfermée, à part progresser sur l’autoroute de l’internement...
Vous avez une pensée émue pour votre ex-beauf. C’est sans
doute une première. Mais, lui, il a tout saisi à la pandémie et à son potentiel
libérateur. Pour une fois qu’il saisit un truc. Son fils ? Un week-end ? Bah,
en fait... Il adorerait, c’est une décision trop trop dure, mais il préfère
renoncer à être cloîtré avec un non-adulte qu’il faut occuper, éduquer et
nourrir. Faut le comprendre. Une fois, il a eu une gastro et il en garde un
effroyable souvenir. Il avait été malade, mais malade! C’est simple, il n’avait
même pas pu aller à son golf dominical. Carrément. Alors, il se sent pas
d’affronter un virus. Même potentiel. Trop risqué. En plus, pas de cantine, pas
de restaurant, pas de bonne (cette conne, elle a préféré rester enfermée dans
son deux pièces...), c’est tout bonnement (ah, ah, votre ex-beau-frère, c’est
plus fort que lui, il est d’un drôle !) insurmontable. C’est vrai, ce serait
dommage que la médecine doive s’échiner à le réanimer s’il est contaminé. La
médecine a mieux à faire. Pas faux.
Finalement, vous optez pour ne pas répondre à Choupinette.
Et vous vous lancez dans une valeur sûre : le
repas-apéro. Ça fait deux mois que vous faites des repas-apéro. Simple, varié,
des chips pour le plaisir, des bâtonnets de carottes pour l’alibi, et du
saucisson pour distraire les enfants : qu’ils ne réalisent pas que vous
survivez à ce bordel mondial grâce aux grammes qui ne vous quittent pas. Dans
le sang. Dans les cuisses, ce serait plus des kilos que des grammes. Rapport au
repas-apéro. Peut-être.
Mais, promis, vous arrêtez en même temps que le virus. En
septembre. Non ? Pas en septembre ? Bon. Faudra peut-être retourner
dans une boutique alors. Pour un jean. Rapport à six mois de repas-apéro.
Peut-être.
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