U.S.: le restaurant (partie 1)
Les États-Unis, contrée grandiose, contrée généreuse.
Choupinette et Choupinet apprennent l’expression « à
volonté ». Eux qui ont grandi bercés au doux son de « non »,
« pas maintenant », « plus tard », peut-être »,
« jamais »… Ils découvrent avec délice une autre chanson.
Plus vous avancez dans ce road trip, plus vous craignez le retour. L’avion, les buildings
gigantesques, la foule : vous choisissez définitivement mal vos peurs.
Vous auriez mieux fait de trembler pour vos principes alimentaires. Votre tâche
va être infiniment plus complexe maintenant que Choupinet a ouvert les yeux sur
un mode où le gras et le sucre n’ont comme seul maître que l’envie du moment.
Bien sûr, en bonne française, vous tenez à inculquer à votre
descendance un goût pour le goût. Vous martelez ainsi, à chaque escapade loin
de votre table, que découvrir, c’est aussi manger. Et Choupinet est sensible à
cet enseignement plus qu’à tout autre… Vous pouvez compter sur lui pour vous
rappeler fort à propos vos précieux principes. D’Italie, d’Espagne, de Suisse,
de Charente, de Savoie, il a rapporté des souvenirs gustatifs. Vous pouvez être
fière de lui. Sa collecte prend une nouvelle dimension avec ce voyage…
En effet… Mesure ne rime pas avec Amérique. Boulimique, si. Je
mange donc je suis, telle semble être la philosophie du pays. L’immense panneau
publicitaire qui vous avait interloquée à New-York prend tout son sens : Sugar is not your daddy … Le jeu de
mots est pertinent : un Sugar daddy
c’est… Vous voyez le président coiffé d’orange ? Bah, c’est ça. Un pervers
qui abuse des colorants et de son pouvoir. Pour sûr, ici, on sucre les fraises
à tout âge et on n’y va pas avec le dos de la cuillère. Une campagne de
prévention, c’est la moindre des choses.
Au pays de Beth Ditto et Amber Riley, il n’est plus question
d’éduquer son palais et de collectionner quelques madeleines du cru, histoire
de se replonger dans son album sensoriel à l’heure du goûter. Le territoire
américain est un immense Enjoy an all you
can eat buffet… Pas besoin de
traduction, Choupinet a compris, il se sert : manger ou ne pas manger, il
ne se pose pas la question.
Chaque lieu lui réserve une nouvelle révélation. À Williams,
le hall d’entrée de l’hôtel s’ouvre sur un charmant salon orné d’un hommage
vibrant à nos amis les trappeurs. Clou du spectacle, au-dessus de la cheminée,
une imposante tête de cerf : qu’est-ce qu’un bon chasseur ? Aime-t-on
les animaux quand on supporte d’empailler leur majesté ? Insensible à vos
douloureuses interrogations, Choupinet s’est arrêté devant un nouveau souvenir
inoubliable. Une machine à pop-corn.
Vous faites du pop-corn quand, les dimanches pluvieux de
novembre, vous regardez un bon film en famille. Quand vous y pensez. Et quand
vous avez du maïs à éclater sous la main. Autrement dit jamais. Étant donnée
votre aversion pour les immenses complexes aux centaines de salles obscures
peuplées de hordes de gloutons qui bâfrent à grand renfort de mastication et de
propulsion abjecte des miettes qui échappent à leurs mandibules, Choupinet et
Choupinette ne fréquentent que de petits cinémas où travaillent de
bienveillants bénévoles proposant une sélection sélective de deux, trois grand
maximum, films par semaine, voire mois…, films qui se savourent sans
sucreries : ça ne gâte pas que les dents. Alors tomber sur du pop-corn,
c’est une joie égale à celle d’un orpailleur qui trébuche sur une pépite. Et
là, c’est un filon. Inépuisable !
Salé, sucré, le pop-corn, Choupinet en croque dès qu’il sort
de la chambre. Et il trouve moult raisons de faire un tour dans le couloir, ça
va de « J’ai cru entendre un bruit… » à « Je n’ai pas bien observé
les bois de ce magnifique cerf qui me fascine inexorablement… » à
« Je trouve plus ma chaussette, j’ai dû la laisser dans le couloir… »
Ouais… Près de l’incroyable machine à pop-corn, celle qui fait « pischhh,
poow, bam, pop ! » et re « pop, pop, pop ! », celle
qui est en passe de supplanter le bandit manchot dans l’imaginaire affamé de
votre Choupinet.
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