Bonnes résolutions (partie 3)
Toujours avide de logique, vous pouvez vous lancer dans la
résolution « manger sainement ». Facile. Dit la marathonienne au périnée
intact. Parce que l’enfant a trois obsessions dans la vie : pimenter diablement
la vôtre, le sucre et le gras. Quand vous essayez de glisser des courgettes
dans les lasagnes, Choupinette hurle au crime de lèse - gastronomie. Remplacer
la glace par une salade de fruits s’apparente à un putsch réprimé promptement.
La soupe n’est tolérée qu’avec litre de crème, kilo de gruyère et croûtons...
Alors s’aventurer sur le terrain du brocoli vapeur et du cabillaud avec sa
petite rondelle de citron... Songez plutôt à inculquer à votre progéniture ce
geste délicat qui consiste à balancer ses chaussettes puantes et le slip
assorti dans la panière à linge sale et non sur le sol : votre pourcentage
de succès sera infiniment plus élevé. Comme en témoignent les quinze dernières
années de mélange serviette trempée - jean boueux - tee-shirt étrangement
constellé de sauce tomate (il était pourtant blanc huit heures plus tôt ?
Non ? En même temps... Blanc... Vous aimez les défis...) jonchant le
carrelage de la salle de bain soir après soir.
Envisager de déguster votre courgette à l’eau et son filet
de dinde à la poêle antiadhésive tandis que Choupinet et Choupinette reprennent
un peu de raclette ? Parce que le fromage est la solution pour affronter les
frimas. En tout cas tel est leur credo, d’octobre à mars. Credo dont, parfois,
vous doutez quelque peu : Choupinet appartient tout de même à cette
génération étonnante pour laquelle pulls et manteaux sont aussi utiles que
palmes et tuba à un chat. Génération qui passe donc son temps à égarer ces
accessoires inutiles, au plus grand mépris du budget parental. En même temps
pourquoi vous obstinez à remplacer le superflu ? Ah… Quand vous ne voulez
pas comprendre, vous…
Mais revenons à notre odorant fromage fondu… Glissez une
lamelle de Morbier, une pointe de Bleu, ce sera délicieux… Hein ? Oui, un
peu de lucidité, jamais vous ne résisterez. Manger après eux ? Hum. Vous
allez juste manger deux fois, c’est contre-productif. Manger dans une autre
pièce ? Riche idée ! Et pourquoi pas à même l’écuelle, dans la
cave ? Non… ça fait trop esclave philippine. Déjà que vous avez les yeux
en amande et une fâcheuse tendance à exécuter toutes les corvées de la
maisonnée… Oups ! Correction ! À faire tout le sport de la maison…
Mais, non, vous n’êtes pas faite pour le job : votre anglais est médiocre,
vous n’êtes que modérément appréciée pour votre douceur avec les enfants et
vous avez l’outrecuidance de vous endormir bien avant minuit en laissant la
vaisselle sale tremper dans l’évier…
Résolution rejetée donc. Autre chose ?
Garder votre calme.
Non, ce n’est pas un impératif, mais bel et bien un projet à
l’infinitif… Non, ce n’est pas étrange… Seule la connasse au périnée immaculé
peut feindre l’incompréhension : tout individu chargé d’enfants comprend
fort bien que le calme est un objectif à atteindre, souvent visé, rarement
obtenu… Bah, oui : à cause des obstacles, du parcours semé d’embûches qui
peuvent tout à coup vous faire plonger dans l’hystérie absolue. Et peut-être
aussi à cause du manque de temps pour pratiquer le mélange subtil et nécessaire
de yoga et de sophrologie quotidien. Pratiquer le mojito journalier est plus
aisé. Vous y songez…
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