U.S.: L. A. (partie1)
Il y a six
heures, vous étiez à New York, il y a six heures vous aviez oublié pourquoi ce
voyage n’était pas une bonne idée. Parce que.
L’avion…
Pas
étonnant que les dieux nous en fassent baver à longueur de temps. Le dieu du
talon (pété, le seul jour où vous êtes vraiment pressée… Certes, vous l’êtes
tout le temps. On va pas chipoter), le dieu des nœuds (dans les cheveux de
petites filles récalcitrantes au peigne. Certes, elles le sont toutes. On va
pas chipoter), le dieu du cauchemar (récurrent, la nuit. Certes, le
cauchemar a rarement lieu à l’heure du
goûter. On va pas chipoter)… : ils sont nombreux à nous foudroyer de mille
maux pour nous punir de notre égo démesuré. Et vous les comprenez. Pour qui
se prennent donc ces humains à oser quitter le sol ? Aberration des
aberrations…
C’est pas
stable, c’est bruyant, ça pollue et ça s’écrase. Pourquoi avez-vous accepté de
monter dans cet engin ? Pourquoi, vous qui avez une mémoire passoire telle
que vous ne percevrez pas les premiers, ni les autres, signes d’Alzheimer,
pourquoi vous souvenez-vous parfaitement de Vol
93 ? Deux Lexomil et trois verres de vin ne parviennent pas à vous
plonger dans une inconscience ardemment souhaitée : quitte à vous
retrouver disséminée en plein de petits bouts de vous à la surface de la terre,
vous préféreriez que cela se fasse pendant votre sommeil… Mais non. Le dieu du
vol veille. Et il n’est pas content de votre comportement.
Six heures et des turbulences plus tard, tout est oublié.
Remerciez votre passoire. Vous foulez avec délice le sol de la longue file
d’attente pour les passeports, celle de la déclaration pour la douane.
Vous êtes sauve et sereine : vous
avez déclaré n’apporter ni mangues ni serpents. Choupinette le confirmera, elle
vous garde rancune de votre ophiophobie.
Et votre arrivée est bien préparée. Tout a été pensé. Vous
avez le GPS. Vous avez réservé une voiture. Du moins l’agence l’a réservée.
De vol en vol, de décalage en décalage, il est 22 heures,
vous êtes épuisée mais confiante : dans une heure vous dormirez d’un
sommeil réparateur. D’ailleurs un angelin fort avenant, à faire passer les
affables new-yorkais pour des parigots, vous indique immédiatement la navette
qui vous conduira promptement au loueur de voiture. Comble de chance, l’endroit
est vide, vous avez dû arriver entre deux vols, vous en baillez de
satisfaction. Vous laissez Nounours se
diriger vers le comptoir : les bagnoles, vous voulez bien entretenir ce
cliché, c’est affaire d’hommes. Étant donné que votre mansuétude va de pair
avec le fait que vous lui laissez systématiquement le volant, y compris après
les crémaillères, les mariages, les dîners en ville et autres occasions de
festoyer, vous lui devez bien cette concession à son égo.
Le loueur vous regarde. Ou, plus exactement, il regarde vos
bagages. Ceux de Choupinette. De Choupinet. De Nounours. Les vôtres. Jamais ça
ne rentrera. Le loueur est catégorique. Et goguenard. C’est les français, ça,
commente-t-il, ils aiment les voiturettes. Mais puisque vous n’avez pas su
choisir entre votre short bleu et votre short bleu marine, il vous faut une
vraie voiture, avec un vrai coffre, une américaine, une Ford. Mais ça coûte un
supplément. Américain lui aussi.
Nounours
vous jette un coup d’œil…
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