U.S. : Times square (partie 2)
Au gré des
hectares parcourus, vous croisez une faune parfois déroutante. Choupinet et
Choupinette s’interrompent alors dans leurs tentatives d’apprivoiser des
écureuils qui ne se sont pas encore soldées par une morsure prévisible. Le dieu
de l’assurance maladie doit être avec vous. Ils sont médusés. Et vous
reconnaissez de bon cœur que l’Amérique, décidément, regorge d’innombrables
vertus. À son crédit, vous pouvez notamment mettre une vingtaine d’années
(après, vous estimez que ce n’est plus de votre ressort. Il doit, il devrait, y
avoir une date de péremption à la responsabilité parentale. Vous ne parlez pas
d’un bête point de vue pénal. Non. Un truc du genre « appelle quelqu’un
d’autre. J’ai été esclave maltraitée pendant 30 ans, c’est énorme, mais c’est
fini. Tchao. ») de tranquillité
quant aux velléités stylistiques de Choupinette. Les cheveux verts, rouges,
bleus, violets, ou les quatre à la fois, qu’elle a vus arborés par des individus,
homme ou femme, de 7 à 99 ans, lui ont définitivement donné un goût pour la
simplicité.
Idem pour
les piercings. Quant aux tatouages, au cours de votre périple, Choupinette en
verra de toutes sortes : des symboliques, des animaliers, des incompréhensibles,
des méconnaissables… Vous n’aurez plus besoin de lui expliquer que, le problème
du tatouage, c’est que son support vieillit, flétrit. Cette femme d’un certain
âge, cette vieille peau pour tout dire, qui confond Central Park avec une plage
privative, a certainement, peut-être, été ravissante à 20 ans, folâtrant dans
les bois de l’Utah, une vigne vierge partant de sa cheville remontant le long
d’un genou joli pour s’aventurer plus haut. Mais à 40 ans et le triple de kilos
plus tard…. Après avoir bloqué sur des motifs plus ou moins originaux et de
plus ou moins, surtout moins, bon goût, Choupinette a renoncé à jamais à la
moindre petite fleur sur son épaule.
Merci
l’Amérique.
Mais elle
n’est pas à mettre entre toutes les mains. Vous craignez fort que la moitié
masculine de la famille rêve dorénavant et inexorablement de donuts et soda à
volonté pour faire passer trois doubles hamburgers arrosés de frites. Le tout
dégusté au volant d’une Ford gigantesque.
Avant d’en
venir à des moyens de transport plus radicaux, vous reprenez la direction du
métro pour rejoindre Times square. Et vous osez acheter des billets avec votre
carte dorée. Téméraire que vous êtes. Pourtant vous le savez maintenant. Vous
avez appris.
Vous avez
choisi d’investir dans cette onéreuse carte en prévision du voyage. En raison
de son assurance. Une assurance formidable. Géniale. Parfaitement protectrice.
Impossible de vous arnaquer. Impossible de payer également. Et vous ne parlez
pas d’un voleur éventuel, mais du propriétaire. On a oublié de vous préciser
que cette carte ne peut être utilisée sans contacter sa banque 48 heures à
l’avance. Pour la prévenir d’un retrait. Pas étonnant que les paiements
frauduleux soient remboursés dans de telles conditions…
Ainsi quand
vous avez voulu payer les billes N.Y. -L. A. sur American Air Lines (un site
obscur et méconnu…), votre carte dorée n’a jamais été acceptée. Vous avez mis
trois jours et moult essais à comprendre. Suspicion de fraude. Vous habitez en
France. Qu’est-ce que vous iriez branler aux U.S. ? Surtout après des
élections pareilles. Douteux.
Vous avez
appelé votre banque : votre conseillère a mis elle-même 48 heures à
comprendre et régler le problème. Entre temps les billets avaient augmenté de
100$ par tête de pipe. Non couvert par l’assurance, bien sûr.
Dans le
métro, vous regrettez à nouveau votre investissement doré. Par une bizarrerie
qui s’explique sans doute par votre maîtrise de la langue, ou de la
technologie, ou les deux très probablement, vous ne parvenez pas à trouver comment
acheter quatre billets en une seule fois… Vous renouvelez donc l’opération. Dès
la troisième fois, votre carte est refusée. C’est suspect, quatre voyageurs.
Certainement une fraude. En même temps, il faut reconnaître que N.Y. doit très
bien, très très bien, se visiter à deux. Drôle d’idée d’emmener dans ses
bagages deux moins d’1m40… N’empêche… Le pile ou face métro/énième marche à
pied en ville, ça risque de ne pas susciter un enthousiasme délirant…
Heureusement, Nounours est là. Avec sa vieille carte bancaire mal assurée que
vous pouvez utiliser librement.
Grâce à lui
vous rejoignez Times square sereinement. Et vous en prenez plein les yeux. Des
écrans géants mettent en scène des sucreries jaune et rouge devenues héroïnes
de films cultes revisités. Tout brille, tout clignote. Vous découvrez ce que
publicité veut dire. Vous n’êtes pas historienne, mais il est impensable que ce
concept visant à développer le commerce n’ait pas été inventé sur ce continent.
Les crieurs, à coté de ces panneaux lumineux de plus de trente mètres de haut,
c’était pipi de chat.
Éblouie par
le tumulte lumineux, vous n’avez pas perçu que Choupinet et Choupinette
étaient, eux, subjugués par un phénomène tout autre. Un individu à vélo. Banal.
Que nenni. À l’observer plus attentivement, ce n’est pas une écharpe que le
monsieur porte négligemment autour du cou. Non. Ça bouge. Ça glisse. Ça serre.
C’est un serpent. Un gros. Un blanc. Un terrifiant. Avec des écailles de
serpent. Et une langue de serpent.
Choupinet
et Choupinette, fascinés et prudents, font un pas en avant, deux en arrière… Le
monsieur est en pleine tentative d’approche d’une jeune beauté. Il ne leur
prête pas attention. Quand, soudain, il se tourne vers Choupinette, médusée,
lui demande cavalièrement si elle veut le porter (en anglais, ce qui n’aide pas
à la communication, quoiqu’en pensent les anglophones...), tout en lui mettant
sur les épaules cette chose blanche aux yeux rouges ! Lui n’en a que pour
la grande brunes aux longues jambes. On le comprend, elle est drôlement plus
sympathique que le compagnon perfide qu’il vient d’abandonner négligemment sur
votre Choupinette ! Le monstre apprécie sa nouvelle conquête, il glisse sa
tête vers son oreille, se fraye un chemin sur la chaleur de sa peau ! Et
son propriétaire ? Que fait-il ? Il bavarde, roucoule… Et vous ?
Rien ! Vous reculez et vous tordez hystériquement les mains ! Vous
pensez si ça aide Choupinette ! Horrifiée, elle réalise que si elle se
fait attaquer par un boa, ou un orvet, vous n’hésiterez pas. Vous fuirez plus
vite que Speedy Gonzales. Elle n’en est malheureusement pas à sa première
déception : le serpent ne fait que s’ajouter à la longue liste de
bestioles charmantes, telles araignée, guêpe et pince-oreilles, qui peuvent l’approcher en toute quiétude ;
vous aurez disparu, loin, très loin. Elle n’a plus qu’à compter sur Nounours.
Ou sur le sens du commerce.
Le monsieur
récupère son bien et vous réclame 3$. Malin. La peur et le souvenir les valent
bien. Vous lui concédez avec soulagement et bonne grâce, d’autant que vous
commencez à vous habituer à la pratique des taxes cachées. Aux U.S., on paye
toujours plus que ce qui est affiché.
Mais ceci est un autre chapitre.
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