Covid long (2/2)
Choupinette, quant à elle, a un avis
très sûr sur votre cas. Son diagnostic est sans appel : colère, avec
éruptions de mauvaise humeur. Selon elle, « ah, bah ça
promet ! » (Pour bien visualiser le ton de la morpionne, ajoutez des
yeux blasés levés au ciel, une voix excédée et un dos désabusé qui s’éloigne…)
Rigole, rigole, Choupinette. Profite bien de ton itinéraire d’enfant gâtée. Quand
ton tour viendra : privée de paracétamol !
Et son tour fut venu. Évidemment,
contrariante comme seuls les enfants savent l’être, elle sautille vers sa
vaccination avec insouciance, ne sent ni l’aiguille ni la piqûre du moindre
symptômounet.
Tandis que vous quittez… Et ça
recommence, encore et encore, c’est que le début, pas d’accord, pas d’accord.
Punaise, ça vous reprend : même la vaccination d’autrui vous déclenche
d’étranges symptômes. Vérifiez : vous n’avez pas pris l’accent
agenais ? Sur le départ, donc, un cri à glacer le sang le plus bouillant
transperce les oreilles des malheureux qui attendent leur tour. Un long cri.
Qui se répète. Qui se mêle bientôt de gros pleurs déchirants. Bon courage pour
poursuivre la tournée de piquouse maintenant…
Une que cela ne perturbe aucunement,
c’est la fieffée salope en robe pêche. Grossière ? Certes. Vous n’y pouvez
rien. C’est un symptôme. Cela va certainement passer. Cette fichue connasse,
donc, feint de ne pas voir que tous les vaccinés attendent patiemment et dans
l’ordre le fameux tampon, demi-sésame pour avoir droit de noyer en terrasse leur
pandémique épuisement. Elle feint de ne voir aucun de ses malheureux et
nombreux compagnons de vaccination pour se mettre au premier rang et éviter
ainsi de poireauter vingt minutes dans ce gymnase qui suinte un délicat
cocktail de tristesse, contrariété, espoir et peur. Le vaccin a dû lui griller
les neurones, lui perforer la courtoisie, lui saccager le bon sens. Ou elle
était déjà en déficit en arrivant, étant donné qu’elle a usé de la manœuvre à
chaque étape du parcours pourtant clairement expliqué : trois fois qu’elle
méprise autrui. Ou elle se croit tout droit sortie de la cuisse de Véran à
l’imberbe torse. Ou elle croit qu’elle peut avoir un rabiot si elle se
précipite. Ou elle aurait besoin d’un bon rééducadrome pour cesser d’être une
crevarde égocentrée juste bonne à baffer. Pétasse.
Vos symptômes ? La guérison n’est
peut-être pas pour demain… C’est long une rémission… Mais, après tout, il faut
bien s’adapter à son époque. Or tout est long depuis ce sombre janvier
2020 : la pandémie, l’attente, les espoirs déçus, les confinements,
l’école à la maison…
Heureusement le pass va non seulement
vous ouvrir l’accès aux terrasses mais vous garantir une année scolaire de
liberté enfin retrouvée. C’est sûr. On vous l’a promis. Le vacciné aura le
droit d’être éduqué loin de vous, à la satisfaction de tous. Plus de distanciel.
Merveille des merveilles. L’ARN messager va vous rendre vos ailes. C’est sûr.
Peut-être pas à cent pour cent. Mais il est tout bonnement impossible, après
avoir si fortement incité toute une population, de découvrir que, de mue en Mu,
le vaccin n’aurait qu’une efficacité à cinquante pour cent. Impossible. C’est
sûr. Sinon c’est la porte ouverte à
n’importe quoi : reconfinement, dose mensuelle, retour du distanciel… Non.
Ça n’arrivera pas. C’est sûr. Connards. Hein ? Ah, oui, affreux vos
symptômes… Et pas de remède. Il va falloir être patient.
Heureusement que le temps de
l’incitation forte ne peut qu’être éphémère. Vous, la dernière fois que vous
avez fortement incité Choupinet à réviser, en le menaçant de ne plus avoir
accès à son portable, il vous a traité de dictateur, s’est montré quasiment
aussi virulent que vos pires symptômes, a hurlé au chantage, s’est rebellé
contre vos menaces, a argumenté avec force contre ce qu’il a taxé d’oppression
honteuse et anti-démocratique. Il n’y connaît rien en incitation, Choupinet. Ni
en gouvernance familiale. La présidente, c’est vous. Le Sénat, c’est vous.
Enfin, c’est Nounours, mais, s’il veut manger, il sait à quoi s’en tenir.
Heureusement vous n’êtes pas cubaine. Précisez
que vous ne sauriez vous passer de café, qu’un petit Havana-Club de temps en
temps, sur fond de Buena Vista Social Club, ne se refuse pas. Et que si on vous
offrait un pass pour découvrir cette île des Caraïbes, vous signeriez
immédiatement. Même leurs vaccins ont des noms sympas : Abdala et
Soberana2. Si ça ne donne pas des envies de salsa et de mojito… Toutefois, ce
qui fait moins rêver, c’est la vaccination à partir de deux ans… Heureusement
qu’on a assez de recul sur cette pandémie pour être pleinement assuré que des
générations entières ne découvriront pas que l’ARN messager a livré des colis
piégés qu’on ne lui avait pas demandés… Encore plus rassurant : la
vaccination des bambins tente également la Chine. Tout va pour et vers le
mieux, donc.
Mais ceci est un autre chapitre…
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