U.S. Monument Valley (2/3)
Suffisamment pour que vous gardiez votre sang-froid lorsque
vous doublez un camping-car, qui a la taille d’un bus, et qui remorque une
voiture (pour les petits déplacements sans doute, louable attention, prémices
d’un frémissement de conscience écologique) qui a la taille d’un minibus
(difficile de se refaire…), voiture couverte des vélos de la famille. Même pas
peur ! Eux, en tout cas.
Vous, vous doublez en croisant les doigts pour ne pas finir
écrasée par le monstre ou son homologue qui arriverait en face. Vu le temps
qu’il faut pour doubler une telle longueur de carrosserie, vous comprenez mieux
ces longues lignes droites tracées à travers les états. Peu importe le
relief : il faut voir si vous pouvez vous avancer sans vous retrouver
nez-à-nez avec un Monster truck. Vous
accélérez. Un tantinet seulement. Vous n’avez pas envie de déclencher une pluie
de gyrophares…
Ils ont trop regardé Chips,
les flics du pays. Ça fait peut-être même partie de l’examen d’entrée… « Bill,
comment orthographiez-vous Ponchorello ?... Très bien. Vous êtes reçu.
Tenez. Votre Glock 17 et vos gyrophares. »
Rien de plus sérieux. Vous avez déjà croisé plus d’un
malheureux, ayant dépassé de quatre bons
km/h la limitation de vitesse, sur le bas-côté, en vilaine posture. Si on vous
avait dit que les suisses pourraient passer pour de grands délinquants de
l’asphalte, ici-bas, quelque part, sur cette terre… La police américaine a un
petit faible pour le son et lumière. Carrément flippant. Vous ne brûlez pas du tout de vous retrouver
mains sur le capot, avec un uniforme trop rempli vous demandant vos papiers,
pendant que Choupinette quémande en trépignant une traduction pour ses
« Mr et Mme… » Un coup à finir au poste, accusée de mettre sa
progéniture sous coke, tout ça pour avoir atteint un terrifiant 72 km/h… Le
consulat saisirait certainement l’opportunité de vous voir finir vos jours
plein de fiel loin de la mère patrie… Vous êtes brutalement ramenée à la
réalité.
« Stop meth
now ! »
Ce n’est pas ce que vous hurle un représentant des forces de
l’ordre. Non. Tout de même… C’est ce que vous lisez sur le panneau qui borde la
Highway 89 en direct de Monument
Valley.
Punaise. Vous ne déliriez donc pas. Il n’y a pas qu’à Amboy
qu’on cherche des occupations (lecteur, si tu es perdu, relis On the road…). Faut comprendre. Pour
survivre aux grands espaces, s’halluciner en lézard à la Morrison, c’est le
minimum vital…
Des jours que vous cherchez une explication aux caravanes et
autres bicoques posées en plein désert, sur la route de Grand Canyon, sur celle
de Monument Valley… Que fait-on quand on se trouve au centre d’un cercle d’un
diamètre de dizaines de kilomètres, plongé dans une aire de vide et de
broussailles ? On apprivoise un scorpion en vue d’un numéro pour faire un
tabac à America got a talent, et déménager, enfin? On devient dès l’enfance cactusophile
tendance poussièrologue ? Et si on a des enfants ? Où sont-ils
scolarisés ? Encore faut-il avoir traversé le désert pour trouver un
individu avec lequel se reproduire… Et le facteur ? Comment vient-il à
bout de sa tournée, avec des boîtes aux lettres espacées d’une cinquantaine de
kilomètres ? Un facteur par maison ? L’organisation d’un relais
postier ?
Autant
d’énigmes dont vous n’aurez, et peut-être est-ce mieux ainsi…, jamais la
solution. Il n’en reste pas moins que l’hypothèse que ces abris précaires recèlent
des dealers en herbe est des plus vraisemblables. C’est ça ou écrire Breaking Bad… Et tout le monde n’est pas
Vince Gilligan.
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