Le ski (partie 2)


Au sortir de cette expédition harassante, un père hurlant sur ses deux rejetons vient heureusement vous distraire. «Mais bordel, qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi tu pleures ? » « Parce queee tu nous a diiiit de pas rester seeeeuls ! Qu’on pouvait nous enleveeeeer ! » « Mais merde ! Pas ici ! Pas maintenant ! Pas en plein jour ! Et toi ? Pourquoi tu pleures ?! » « Parce queeee mon frèreeee y pleureeee ! » C’est beau la solidarité fraternelle. Et bruyant.
Mais vous confirmez. Personne n’aurait l’idée de s’encombrer subrepticement d’un apprenti Armstrong. Trop galère. Quant au kidnapping fondamentalement nocturne… Peut-être que l’idée n’est pas des plus judicieuses pour profiter de nuits sereines… Le silence, et dors ! Comme on dit. Il verra ce soir, le malheureux papa… N’empêche qu’avant de briefer son gosse sur les tentatives d’enlèvement, faut y réfléchir à deux fois. Ça peut vous péter à la gueule à tout moment, un truc pareil…



Rassurée par ce père au langage fleuri, infiniment heureuse de constater encore une fois qu’être un parent est une immense galère où chacun rame comme il peut, vous lancez Choupinette et Choupinet sur les pistes aux étoiles.
Deux heures de tranquillité. Vous avez envie de pleurer. Deux heures de tranquillité.
C’est nul.
Deux heures. Cent vingt minutes de liberté. C’est rare. Précieux. Vous en rêvez souvent. Et là, elles vous sont offertes et c’est un immense gâchis. Parce qu’il fait froid. C’est simple, la température est carrément négative ! Et vous ne parlez pas du ressenti. Ne serait-ce le panneau « Tartiflette à volonté » sur le seul estaminet de la station, vous vous croiriez à Iakoutsk. C’est dire.
Non ? Якутск ? En Sibérie ? Bon. En tout cas, il y pèle grave. Une zone de permafrost. Si. Souvenez-vous. Climat tellement clément que le sous-sol est constamment gelé. Toute l’année. À Iakoutsk, il y a même un musée du mammouth, da, le froid n’exclut pas la culture, et au moins on sait comment occuper son dimanche polaire.
Un musée et un institut de recherche du permafrost. Son but ? Trouver des solutions. Eh, pas bête… Plus d’un institut devrait s’en inspirer… Non… Mais là, c’est parce que construire sur sol gelé, ce n’est pas du gâteau. Et c’est ruineux. Alors on recherche.
Du gel toute l’année… Brrrrh, ça fait frémir. Allez seulement planter des tulipes et des narcisses dans ses conditions. Un bled pareil, c’est juste bon à faire un goulag. Ça n’a pas échappé à la sagacité russe, d’ailleurs. L’enfer, ce n’est pas barbecue à volonté et flammes à perpétuité. Non. L’enfer, c’est stalactites au bout du nez et doigts d’un beau bleu amputation.
Puisque vos extrémités ne sont pas prêtes pour de tels traitements, puisque vous n’avez en commun avec Marion Rolland, en cherchant bien, que le « n » de vos prénoms, vous traînez votre carcasse transie jusqu’ « Au Reblochon joyeux ».



À l’intérieur, ça sent moins le fromage que la chaussette mouillée. Ou un savant mélange des deux. Vous ne sauriez dire… « La porte ! » Ah. Oui. C’est ballot, un chalet d’altitude dont la porte ne se ferme pas automatiquement. Forcément ça n’aide pas le poêle à réchauffer l’atmosphère. Moniteurs et pisteurs ont néanmoins pris une option durable au coin du feu et peaufinent leur maîtrise du p’tit verre d’vin chaud… Et vous leur avez confié vos minis Youri… Vous en auriez des sueurs froides, si ce n’était un pléonasme trop grossier.

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