U.S.: le métro (partie 1)
Ce séjour new-yorkais vous donne l’impression d’avoir plongé
dans une autre réalité, celle de tous les écrans, petits et grands. Où que vous
alliez, quoi que vous fassiez, tout prend soudain un petit supplément
d’art : serait-ce l’origine de la confiance américaine ? Avoir chaque
jour le sentiment que sa vie vaut non seulement le coup d’être vécue, mais
pourrait tout aussi bien être filmée et produire un incroyable blockbuster…
Trois jours que vous êtes ici et vous n’avez toujours pas
atterri, scotchée que vous êtes par le spectacle : humer l’air new-yorkais,
ça vous fait plus d’effet qu’un trip sous coke. Et toujours pas de descente…
Vous recommandez. C’est donc l’esprit émerveillé que vous abordez le métro. Ce
dernier a le parfum de ses homologues français, vous n’êtes pas dépaysée. Mais
il va falloir vous repérer. Autre paire de manche… Vous n’êtes malheureusement
pas équipée de l’option « plan »… Au grand regret et à la totale
incompréhension de Nounours.
Vous avez connu des disputes volcaniques sur la route des
vacances, une gigantesque carte sibylline sur les genoux, la sueur aux tempes.
Vous aviez beau la tourner dans tous les sens, analyser la légende avec
minutie, tenter de la tenir à bout de bras ou collée à votre nez : la
carte restait hostilement hermétique, conservant jalousement l’emplacement secret
de vos vacances. Vous auriez fait un piètre pirate. D’autant que Nounours vous
jetait des regards tout juste bons pour de la pâture à requin, en lâchant des
jurons à faire frémir Barbe-Noire. Le GPS vous a sauvé.
C’est certainement l’une des plus belles inventions de ce
siècle (loin d’être fini, mais vous prenez les paris : rien ne réduira
autant le nombre de divorces que le GPS. Le mixeur et le lave-vaisselle, fort
utiles au demeurant, ne peuvent en dire autant.) : un must à placer en
tête de sa liste de mariage. Si indispensable, le GPS, qu’une panne de quelques
minutes, de quelques secondes peut être tout simplement catastrophique :
sans lui, vous êtes perdue. Littéralement.
S’il vous lâche, vous pouvez rater LA sortie d’autoroute et
continuer à rouler éternellement, sans savoir où. S’il a sauvé votre couple, la
géographie ne lui dit pas merci, au GPS. La tante Léonie non plus : vous
n’êtes jamais arrivée à temps pour la voir souffler ses quatre-vingt bougies à
Brévainville, vous avez arpenté le Loir-et-Cher des heures. En vain. Vous ne
saviez même pas dans quel département vous erriez, aveuglément confiante en
votre GPS. Qui, diabolique, s’était soudainement tu en rase campagne, loin de
toute civilisation : personne pour vous renseigner, la dizaine d’habitants
du bled étaient tous à féliciter tata Léonie. Point de regret : pour
prendre la bonne rame de métro, vous ne pouvez faire autrement que d’affronter
courageusement l’ennemi de vos connections neuronales, le plan.
Heureusement le miracle américain ne s’arrête pas au bacon.
Oui, on peut associer « miracle » et « bacon ». Quand on
évoque une nation qui a jugé opportun, voire nécessaire, d’inventer le
désodorisant pour voiture parfum bacon ou le cure-dents parfum bacon. Vous
n’avez point d’information sur les préservatifs ou les sodas, mais rien n’est à
exclure : la glace goût bacon existe bel et bien. Tout comme le miracle
susnommé. L’Amérique a inventé le plan lisible. Oui. Même par vous. Inutile de
préciser qu’il s’agit là de l’indice qu’on foule le sol d’un pays infiniment
avancé et civilisé.
Vous l’avez découvert alors que vous étiez en train de
réaliser un autre miracle new-yorkais (en miracle, comme en toute chose,
l’Amérique fait dans la profusion) : le New-Yorkais est sympa, serviable. Pas souriant.
Pas toujours. Faut pas pousser mémé dans les orties ! Vous n’iriez pas
demander à un parisien de sourire ! En ville, en vraie grande ville qui se
respecte, on ne sourit pas. Jamais. On court, on bouscule et on sue. En été.
Sauf dans le métro new-yorkais : sur le quai, il fait 50°, dans la rame un
petit 16°... N'empêche que, gelée,
sortant au plus tôt vos écharpes en laine et vos bonnets anti-angine-post-clim,
tenant votre plan de l'autre, vous appréciez qu'un monsieur inconnu, supportant
à merveille les dits 16° grâce à sa surcharge pondérale impressionnante même à
NYC, vous demande si vous avez besoin d'aide.
Mais il
s’avère que cette gentillesse urbainement sidérante est vaine, car, pour la toute
toute première fois, le dédale inscrit sur le petit dépliant n’a rien de
labyrinthique à vos yeux ravis. En effet vous maîtrisez uptown et downtown : le
métro new-yorkais a certainement été imaginé par une femme. Ou un mec qui
aimait vraiment sa femme. Il est bon de se dire que ça existe… Pour lire le
plan, et choisir la bonne ligne, faut juste savoir si vous voulez aller en haut
ou en bas. Merci New York ! Enfin vous pouvez prouver à Nounours que, si,
vous savez lire une carte ! Faut juste qu'elle soit bien faite... Et ce
n’est pas si compliqué d’écrire « haut » et « bas »
sur une carte, de numéroter les rues dans un ordre qui respire la logique.
L’IGN n’y a même pas pensé, l’Amérique l’a fait…
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