La fête d'anniversaire (partie 3, et fin...)


Bougies colorées et parfumées, oui, vous osez tout !  Parfumées à ? À la fraise. La fraise, c’est parfait, c’est sucré et féminin, ça ne peut que ravir des mouflettes, vous étiez-vous candidement dit. « J’aime pas, la fraise », clame Garance. « Oh, ce n’est pas grave, petite Garance, tu l’offriras à ta maman, la bougie, elle sera contente comme tout ». Si elle est polie, ta maman. « Ma maman non plus, elle aime pas, la fraise ». Bon, ben, donne-la à ton chien et arrête de nous faire braire.
Et les couleurs ? Vous avez prévu trois strates merveilleuses : un merveilleux bleu, un merveilleux rose, et un violet forcément merveilleux car résultant du mélange des deux précédents…Ce qui permettra à chacune des louloutes de verser du colorant et du parfum…Comme ça, pas de disputes ! Eh, c’est qu’on n’apprend pas aux vieilles mères à faire la grimace ! « Moi, je fais le violet ! » « C’est-à-dire, Garance, que vous serez deux pour préparer le violet : le violet, Garance, c’est le mélange de deux couleurs… » « Non ! Je veux le faire toute seule ! » « Moi, je veux le bleu ! » « Moi aussi ! » Oui, bon, ben, vous, vous rêvez d’un martini dry et de calme, eh bien, la vie, c’est comme ça, on obtient rarement ce dont on rêve, et encore, vous ne leur parlez pas d’obtenir ce qu’on mérite… La vie est pleine de mauvaises surprises, les louloutes. Par exemple, on peut voir le jour chez des jéhovistes, alors bon, on va éviter de s’étriper pour des motifs d’importance, comme savoir qui verse le colorant bleu, et qui le rouge. D’accord ? Non. Les louloutes préfèrent s’étriper. Génial. Mais qui, qui, a eu cette idée ? Des bougies ! N’importe quoi… Heureusement les vieilles mères sont pleines de ressource : tirage au sort ! Parfait : ludique comme tout, le tirage au sort éteint le feu de la discorde avec l’efficacité d’un canadair.
Vous pouvez commencer à faire fondre la cire. « Moi, je fais fondre la cire ! » C’est fou, ça, on ne lui a pas appris à conjuguer les verbes à une autre personne, à Garance ? Moi je, moi je, c’est lassant, tout de même… « Non, ma petite puce, c’est trop dangereux. Tu risquerais de te brûler ». Ta mère t’a déjà pas mal ratée, si en plus tu lui es rendue avec la moitié du visage cramé au 4e degré, elle ne va pas être heureuse, heureuse, ta mère. « Par contre, tu peux mettre le parfum à la fraise que tu n’aimes pas… » En revanche, un peu de cohérence, Garance, vider le flacon n’est pas une absolue nécessité…

Les bougies refroidissent. Pause goûter ! Et là, là, vous allez frapper un grand coup ! Une idée de génie, vous avez eue…Oui. De génie. Ça ne peut que combler les louloutes. « Fondue au chocolat ! »,  annoncez-vous avec sourire et confiance. Les louloutes se précipitent sur les bols de fruits. Un génie, vous êtes un génie : elles vont manger de bonnes bananes, de bons ananas, de bonnes clémentines sans tordre le nez pour d’obscures raisons, et en plus elles vont adorer, en redemander ! « Elle est au chocolat noir, la fondue ? J’aime pas le chocolat noir, moi, j’aime que le chocolat au lait ! » « Certes, ma petite puce, mais le chocolat a fondu avec du lait… » « Peut-être, mais moi, j’aime pas le chocolat noir. » Hum, hum, ben vous, vous aimez les petites filles bien élevées et qui évitent de taper sur les nerfs à grands coups de moi-je toutes les cinq minutes. Alors, voilà, personne n’a ce qu’il aime. « Ce n’est pas grave, Garance, tu peux manger seulement les fruits… » Elle ne va pas oser ? Si. « J’aime pas les fruits. » Bah tu les bouffes quand même avant que l’Apocalypse te tombe sur le coin de la gueule, par Jéhovah !
Garance boude, ulcérée de n’être pas pleinement entendue : elle vous a pourtant informée clairement de ses goûts. Aline pleure : elle a mis du chocolat sur son chemisier. Marie est verte et sur le point de vomir : elle a boulotté son poids en bonbons avant la fondue pendant que vous veilliez avec diligence sur la fonte de la cire… Pause jeux ! Vous sorte votre dernier atout : « Devine qui je mime ! » On va éviter à Marie la carte « toupie », trop risqué. Garance refuse de mimer le singe, « Moi, je mime pas les animaux. » Réfrénez votre puissant désir de mimer une main qui atterrit violemment dans sa tronche, réfrénez ! Aline vous sauve avec un mime improbable de l’hélicoptère : les louloutes mettent un bon quart d’heure à saisir le sens de ses gesticulations…



On sonne à la porte. Enfin ! L’heure de la délivrance ! Et si ce n’est pas un parent ? Oh. Peu importe. Qui que ce soit, vous lui refourguez Garance. « Tout s’est bien passé ? » Mais oui, aussi bien qu’une coloscopie un jour de gastro. D’autres questions pertinentes ? « Oui, très, très bien, Garance est une petite fille a-do-rable ! » Vous croyez qu’elle va saisir le détachement ironique des syllabes ?  Oh. Il vaut mieux la bercer d’illusions. C’est un peu comme cette loi universellement et totalement respectée : quand un jeune couple sur le point de plonger en enfer demande sottement si c’est chouette d’avoir des enfants, on répond « Chouette ? Chouette ? Mais c’est tellement…merveilleux ! Ah… Difficile de mettre les mots sur un tel bonheur ! On n’imagine pas avant d’en avoir… » Tu m’étonnes… Plus on est de fous, plus on rit…

Mais ceci est un autre chapitre.

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